De la fabrication du papier journal à l’usage des cartons recyclés

9 novembre 2020

Auteur : Roger Brouillette, chercheur chez Innofibre

La fabrication du papier journal est en forte décroissance. Avec la diminution de la consommation du papier d’impression et du papier journal, les producteurs doivent développer de nouveaux grades de papier afin de maintenir les opérations et les emplois au sein d’une communauté. Certaines papetières désirent migrer vers des produits ayant un marché en croissance en utilisant des technologies novatrices.

Parmi ces technologies, il y a celle d’améliorer l’enlèvement des encres dans les cartons recyclés de type « Old Corrugated Container » (OCC) pour obtenir une pâte propre pour la fabrication de grades de papiers pour emballage alimentaire, conformes aux règles de la « Federal Drug Administration » (FDA) ou pour la production de carton servant à la fabrication de boîtes d’emballage.

En raison des préoccupations environnementales, le recyclage des vieux contenants en carton ondulé a pris de l’importance dans l’industrie des pâtes et papiers, car il peut constituer une source de fibres à faible coût. Si la pâte d’OCC est propre et offre de bonnes propriétés, cela peut permettre de concurrencer la fibre vierge, ce qui est innovateur dans l’industrie des pâtes et papiers.

Le potentiel de marché du carton recyclé au Canada et dans le Nord-Est des États-Unis croît de 3 à 4% par année. La production atteint les 42 millions de tonnes en Amérique du Nord. Le taux de récupération moyen des trois dernières années atteint 92,7% comparativement à 54,5% en 1993.

Malgré cette disponibilité croissante de cette matière première et son coût inférieur par rapport à la fibre vierge, la pâte ainsi recyclée doit être propre pour satisfaire les critères du carton alimentaire ou d’emballage. Comme l’OCC peut avoir été recyclé à maintes reprises sans avoir été désencré, les fibres peuvent être contaminées avec de l’encre résiduelle. Un contenu élevé en métaux lourds qui pourraient être ancrés solidement aux fibres compromettra la qualité du papier ou du carton produit.

Dans plusieurs États des États-Unis et au Canada, la législation exige que les composants de l’emballage alimentaire, y compris les encres, ne contiennent pas plus de 100 ppm en poids total des métaux suivants : plomb, cadmium, mercure et chrome. Par conséquent, les métaux lourds présents dans le carton de type OCC peuvent limiter son utilisation dans les papiers d’emballage alimentaire.

Les encres de type flexographiques, utilisées pour l’impression du carton sont à base d’eau et ont tendance à s’accumuler dans les circuits d’eau de l’usine. Malgré l’installation d’équipements performants pour nettoyer le carton recyclé, des contaminants d’encre résiduelle peuvent demeurer dans la pâte.

Les ions métalliques présents dans la pâte recyclée et dans l’encre proviennent de la matière première, tels le bois et le vieux carton, de l’usure des équipements et de la corrosion généralement présente à l’usine. Ces ions métalliques sont transportés dans les eaux des procédés, puis se retrouvent dans les fibres contenues dans la pâte et dans l’eau de dilution.

Le désencrage par flottation conventionnelle est une pratique courante depuis le début des années 1980. C’est l’opération la plus efficace pour enlever l’encre imprimée du papier recyclé. Aujourd’hui encore, ce procédé de flottation est l’opération clé dans une usine de désencrage. Par ailleurs, la flottation sur colonne est une autre technique qui permet de séparer sélectivement les particules hydrophobes telles que l’encre d’une suspension de fibres, tout en minimisant la perte de matières hydrophiles utiles.

La flottation sur colonne est une technologie émergente dans le domaine des pâtes et papiers. Entre les années 1995 et 2005, son utilisation expérimentale de traitement en laboratoire a été principalement étudiée à l’égard du papier journal, du papier magazine et du papier d’impression de bureau. Les études expérimentales sur la colonne de flottation à l’égard du carton OCC n’étaient pas justifiées à cette époque.

Un autre procédé capable d’améliorer le détachement de l’encre est l’utilisation d’enzymes. Cela pourrait contribuer à produire une pâte conforme à partir de l’OCC. Il existe plusieurs enzymes utilisées pour le désencrage du carton comme les cellulases, les hémicellulases, les lipases, etc. L’efficacité de ces traitements sera fonction du pH pendant les opérations, du type d’encre à retirer et du temps de rétention disponible.

Toutes les étapes nécessaires pour atteindre la propreté ciblée sont disponibles chez Innofibre : des tests en laboratoire de mise en pâte avec différents enzymes, un tamisage de la pâte suivi d’un traitement enzymatique, un traitement en cellule de désencrage par flottation avec une enzyme ou un dernier traitement enzymatique sur la pâte épaissie. Après avoir trouvé les meilleurs résultats sur ces séquences de désencrage et avoir détermin l’efficacité d’enlèvement d’encre et la teneur en métaux lourds, des essais en atelier pilote seront réalisés pour ultimement transférer les connaissances en usine et ainsi valider les conditions optimales du procédé à l’échelle industrielle.

Plusieurs usines pourraient être intéressées à utiliser du carton recyclé comme source de fibres pour des produits de qualité. La consommation de carton augmente, ce qui rend cette matière de plus en plus disponible et à bon prix. La population en général est plus sensible à la récupération lorsqu’elle sait que la matière sera pleinement valorisée.

Innofibre contribue à une utilisation accrue des papiers et cartons recyclés pour des produits à valeur ajoutée. Ceci fait en sorte que l’industrie se tourne davantage vers ce type d’approvisionnement disponible en quantité.

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