Auteur : David Myja, chercheur chez Innofibre
En ce début d’année 2021, Innofibre a rejoint le réseau canadien du CRSNG sur l’électronique imprimée verte (Green Electronics Network / GreEN). Depuis 2018, le regroupement GreEN contribue au développement de capteurs à faible impact environnemental pour l’emballage intelligent. L’expertise d’Innofibre dans le secteur des pâtes et papiers et dans la recyclabilité des bioproduits apporte des compétences supplémentaires à ce réseau dans le développement de matériaux verts imprimables, jetables et recyclables ou biodégradables.
Figure 1 Logo du GreEN Electronic Network
Objets connectés et e-déchets
Avec le développement de l’électronique et des technologies, les objets de la vie quotidienne sont de plus en plus connectés, on parle de l’internet des objets. En 2020, on évalue à environ 50 milliards, le nombre d’objets connectés dans le monde. D’ici 2025, ce nombre pourrait atteindre entre 75 et 150 milliards suivant les estimations. La nature des objets connectés a également évolué dans le temps. Lors de l’apparition d’internet, les dispositifs étaient faits pour durer (téléphones, ordinateurs, etc.). Aujourd’hui, en plus de ses appareils, le développement de capteurs et autres dispositifs à usage unique, tels que les étiquettes intelligentes et les pansements connectés, augmentent le nombre d’objets électroniques utilisés et donc à disposer.
Cela mène à une exploitation minière pour les métaux toujours plus importante ainsi qu’à l’augmentation phénoménale de déchets. En 2019, les e-déchets, ou déchets électroniques, ont atteint près de 54 millions de tonnes dans le monde, l’équivalent de 7,3 kg par personne. Ce chiffre pourrait atteindre 74 millions de tonnes pour la seule année 2030. Ces e-déchets, qui se retrouvent principalement dans les sites d’enfouissement ou qui sont brulés, contiennent des métaux tels que l’or, l’argent ou le cuivre qui pourraient être récupérés, mais aussi des plastiques et des résidus toxiques comme le mercure. Ces déchets ayant un impact majeur sur l’environnement, il devient plus que nécessaire de développer des dispositifs électroniques verts.
L’électronique imprimée verte à la rescousse
Le regroupement GreEN a pour objectif de réduire l’impact environnemental de l’internet des objets en développant des capteurs simples, peu coûteux et recyclables ou biodégradables. Pour atteindre ses objectifs, GreEN regroupe des chercheurs d’universités canadiennes et de centres collégiaux de transfert de technologie, des partenaires industriels et des organisations nationales et internationales. Ensemble, ils travaillent sur le développement de l’électronique imprimée verte. Cette technique de fabrication des composants électroniques consiste à utiliser des techniques d’impression classiques (jet d’encre, sérigraphie, etc.) avec des encres conductrices sur différents substrats isolants. Un des principaux avantages de ce type d’électronique est la flexibilité finale du dispositif. La recherche effectuée par le regroupement GreEN se divise en deux thèmes. Le premier vise le développement de matériaux peu coûteux et verts, notamment grâce à l’utilisation de solvants bénins (à faible impact pour l’environnement). Cela consiste également à étudier des encres conductrices à base de carbone ou de graphène. Le deuxième axe de recherche se concentre plus directement sur les procédés d’impression et la fabrication des dispositifs électroniques. Les recherches ciblent autant la formulation des encres que le développement des matériaux imprimables.
Figure 2 Designs imprimés avec une encre conductrice argent sur papier pour le GreEN Electronic Network. Les imprimés fonctionnels sont utilisés comme base pour fabriquer les dispositifs électroniques. Impression effectuée avec la presse rotative de l’Institut des communications graphiques et de l’imprimabilité (ICI) un Centre d’innovation et de transfert technologique du réseau Synchronex
Des avantages et des défis
Les connaissances développées chez Innofibre permettent d’apporter une expertise supplémentaire au regroupement GreEN, tant sur les matériaux imprimables de type papier que sur la recyclabilité et la biodégradabilité des différents supports d’impression. L’électronique imprimée sur papier, bien que moins coûteuse et plus écologique, est moins répandue en raison de plusieurs caractéristiques du papier qui rendent son usage plus complexe. À titre d’exemple on peut penser à sa porosité de surface importante (réduisant la précision de l’impression et donc la qualité du dispositif) ou encore à sa plus faible résistance à la température. L’expertise d’Innofibre dans ce domaine permettra de développer des papiers plus performants avec un impact environnemental le plus faible possible. Concernant la recyclabilité et la biodégradabilité des électroniques imprimées, Innofibre possède des équipements de laboratoire et des installations pilotes d’échelle semi-industrielle permettant une étude complète de ces paramètres. En recyclant les dispositifs électroniques imprimés, on cherche à séparer leurs différentes composantes afin de pouvoir les réutiliser. L’étude de biodégradabilité permet d’évaluer l’impact environnemental des dispositifs électroniques imprimés lorsque leur recyclabilité n’est pas envisageable.
Le développement de l’électronique imprimée autant au Québec qu’au Canada est une vraie opportunité pour les entreprises du pays. Avec l’avènement des appareils électroniques comme les cellulaires intelligents et les tablettes, l’impression de journaux et magazines a grandement diminué au cours de la dernière décennie. Le secteur des pâtes et papiers a dû faire face à des restructurations majeures, à la suite de ce phénomène. L’électronique imprimée peut ainsi permettre à ces entreprises, à l’instar des entreprises spécialisées dans l’imprimabilité, de se tourner vers un secteur d’avenir au fort potentiel de développement.
Pour en apprende davantage sur le réseau GreEN : https://www.nserc-green.ulaval.ca/