Auteur : Julien Bley, chercheur chez Innofibre
L’engouement pour les matériaux renouvelables entraine le développement de nouveaux biopolymères, mais aussi le retour des dérivés de cellulose. Mais ces matériaux ne datent pas d’hier, ces derniers sont apparus avant les plastiques d’origine fossiles actuellement utilisés. Avec les enjeux environnementaux auxquels l’industrie pétrochimique fait face, les biopolymères retiennent de plus en plus l’attention comme solution pour substituer les produits d’origine fossile. L’ajout de groupements fonctionnels à la cellulose permet d’apporter de nouvelles propriétés à la fibre. Ces matériaux renouvelables et prometteurs confèrent des propriétés inusitées à la fibre de cellulose qui peut ainsi devenir ignifuge, hydrophobe, antibactérienne, etc. L’utilisation de la cellulose, le biopolymère le plus abondant sur terre, permet à ces matériaux d’être biosourcés et d’obtenir de bonnes propriétés de biodégradation.
Redécouvrir tout le potentiel de la fibre cellulosique
En 1856, le celluloïd ou nitrate de cellulose fut la première matière plastique synthétique, utilisée dès le début du 20e siècle, entre autres, pour les balles de tennis de table. D’ailleurs, ce type de balle est encore préféré pour ses propriétés avantageuses. Outre le son distinctif produit lorsque la balle de celluloïd touche la table, la surface plus souple de ce matériau permet au joueur de créer plus d’effet qu’avec une balle de plastique. Bien sûr, la balle de tennis de table n’est qu’un exemple des possibilités qu’offre une fonctionnalisation chimique de la cellulose. De nombreuses applications pourraient permettre de substituer des matières issues des ressources fossiles de nos biens de consommation.
Innofibre travaille à développer de nouveaux dérivés de cellulose tels que la fibre phosphorylée. Cette fibre est obtenue en greffant des groupes fonctionnels phosphates à la surface de la cellulose. Elle dispose ainsi de propriétés multiples pour des applications innovantes, démontrées par l’équipe d’Innofibre, à travers ses projets, par exemples : remplacement des produits ignifuges, désinfectants, agents mouillants horticoles, cathodes pour les batteries Li-ion, résines échangeuses d’ions, captation des métaux lourds, etc.
Le développement de procédés de production plus écologiques est un enjeu majeur de la recherche actuelle sur les dérivés et fonctionnalisation de la cellulose. Pour cela, Innofibre travaille à modifier les procédés existants en utilisant des solvants plus verts, en éliminant l’utilisation de produits nocifs pour l’environnement et en valorisant les sous-produits de réaction. Ces nouveaux procédés diminuent ainsi l’empreinte environnementale de ces biomatériaux autrefois décriés.
Des ateliers pilotes adaptés pour ces nouveaux dérivés de cellulose
Innofibre s’est équipé d’un local de type anti-déflagration pour mener à bien les projets de modification chimique de la cellulose. Ce local financé par la Fondation canadienne pour l’innovation (FCI) se compose d’une ventilation dédiée, de plusieurs détecteurs de gaz, reliés à un système d’alarme et d’un système de purification des émissions gazeuses. Ceci permettra à l’équipe de recherche d’Innofibre de mener à bien le développement et la mise à l’échelle de modifications chimiques de la cellulose dans un environnement sécuritaire. Le local dispose d’un réacteur pressurisé de 200 L spécialement conçu pour le traitement de la pâte de cellulose et de biomasse, d’un homogénéisateur de 250 L pour la production d’émulsion, d’un four de 1000 L pour le séchage et le traitement de la fibre. Le local permettra la production de 5 kg/h de fibres phosphorylées et de nanocelluloses phosphorylées.